lundi 30 novembre 2015

Heiwakinen kouen 平和祈念公園

L'espace d'une matinée, l'automne a semblé reprendre ses droits. Le ciel bleu et le soleil n'étaient pas seulement les seuls de retour. Les moustiques aussi, tels une de sept plaies d'Égypte, semblaient sortir d'hibernation comme s'ils avaient été soudainement ressuscités. Sans parler d'eux plus longuement, car vous en conviendrez, ce n'est pas le sujet qui nous intéresse le plus, je tenais néanmoins à vous mettre en garde contre eux. Ces moustiques tigres à dents de sabre sont petits, vicieux, et ils attaquent en silence. Diable qu'ils font de dégâts sur ma tendre peau douce et satinée.

Mais revenons en vite à cette éclaircie et à cet élan de joie qui me saisit lorsque je la vus reparaître au loin. Sans réfléchir, je venais de former une résolution. Il était temps pour moi de marcher au devant de l'inconnu. Certes je n'aurai pas le temps de faire le tour de l'île à pied, et c'est un faible dédommagement par rapport au plan initial, mais c'est toujours ça de pris. Je vais visiter le sud d'Okinawa, en parcourant une boucle qui me ramènera jusqu'à l'aéroport, et me fera passer par le château, le vrai cette fois, de Naha.

Alors ferme dans ma décision, je quitte mon château imaginaire en début d'après midi, le coeur serré et la larme au coin de l'oeil, prête à tomber au moindre coup de vent. On sait ce qu'on quitte mais on sait pas ce qu'on va trouver dit l'adage. Et je savais d'avance que mieux que mon château, ce n'était pas possible. J'espérais juste que ce ne soit pas trop terrible quand même. Ne serait-ce que pour me réhabituer doucement à l'aventure.

Au bout de quelques heures de marche, je suis arrivé à l'étape du jour. Le parc Heiwakinen, ce bout de terre le long de la mer, tombeau des âmes perdues lors de la bataille d'Okinawa, durant la seconde guerre mondiale. Un lieu aussi joli que mélancolique, où malgré mes efforts pour paraître joyeux, je reste touché par tant d'émotions qui se dégagent d'un tel endroit. Ici, tout est propice au recueillement et paraît morne et triste. Le parc abrite quelques 44 hectares de diverses mausolées et autres monuments commémoratifs. Il y'a aussi un musée, une Mecque à la paix et une flamme éternelle, comme celles qui brûlent à Hiroshima et Nagasaki. "Pourvu que la guerre ne soit plus" semblent dire toutes ces constructions. Je partage humblement cet avis.

C'est donc ici que j'élirai domicile pour ce soir. À l'écart bien sûr pour ne pas déranger le repos éternel des corps et cendres reposant ici. À la nuit tombée, je vais faire une balade dans la partie sud du parc, qui par un escalier creusé à même la falaise, entre deux énormes blocs de pierre, mène jusqu'à la mer avant de remonter dans une autre partie du parc. Un paysage déjà fantastique de nuit et qui promet d'être encore plus sublime de jour. Une fois remonté par un autre chemin, depuis lequel je peux admirer la ville illuminée de ces innombrables petites ampoules, j'envisage moi aussi d'aller me reposer.

À peine mon sac de couchage sorti, voici que comme une malédiction qui semble me poursuive jusque dans cet endroit, je vois des phares au loin qui s'approchent. À n'en pas douter, c'est le gardien qui fait sa ronde. Misère ! Je m'accroupis et me fais le plus petit possible dans un coin, jetant de temps à autre un regard timide par dessus le parapet derrière lequel je me cache. Pas de chance, le malheureux se rapproche, comme s'il eut senti ma présence. Il vient si près que mon coeur s'emballe et j'hésite presque à me relever, sûr qu'à si faible distance, il ne peut que me découvrir. Ce qui n'arrive finalement pas.

Cependant, il me laisse avec un doute. Va-t-il repasser un peu plus tard ? Je ne tente pas le risque et m'enfuis vers un refuge plus inaccessible. Mais le problème de cette nouvelle cabane, c'est qu'elle est en hauteur. Le vent y souffle pareil à une tornade et la pluie tombe sur moi en rafale alors même que je suis protégé par un toit. Une fois trempé, je n'y tiens plus et décide de retourner à ma première idée. Il y'a certes toujours le vent et la pluie, mais rien de comparable. Et puis j'imagine mal le gardien venir par de telles intempéries. Ainsi je m'endors, maudissant d'avoir quitté mon confortable château. J'envisage même d'y retourner si le temps du lendemain m'est aussi peu favorable.

Le parc Heiwakinen.

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